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Avant, les fans d'AC/DC étaient des fans d'AC/DC, aujourd'hui, les fans d'AC/DC écoutent d'autres choses et se sentent obligés de faire des comparaisons qui n'ont pas lieu d'être."
Un ami du 7.thMalgré l'éviction d'un Malcolm Young que je considère comme le meilleur guitariste rythmique de tous les temps, je dois avouer ne jamais m'être vraiment inquiété pour AC/DC. Avec un Angus nourri aux conseils de ce dernier et de George Young depuis l'adolescence, je savais que la baraque était aux mains du gars le plus à même de faire d'AC/DC ce qu'il doit être, c'est-à-dire, AC/DC (bah oui). L'ouverture de "Rock Or Bust" se fait avec le titre éponyme, sobre à souhait, un riff bien senti, une basse qui ronronne, un Brian impérial (comme sur tout l'album de toute manière, autant le dire tout de suite), la clé de contact est tournée, le moteur chauffe gentiment, on tape la patte, et on apprécie. Ce titre n'a pour moi aucune autre vocation. S'en suit le joyeux Play Ball, single devant l'éternel qui voit le diable Angus se régaler avec sa guitare, gâté par cette section rythmique qui commence à le pousser gentiment au cul. Le morceau nous pousse au sourire, on sent que le groupe s'amuse et nous emporte avec lui dans ce sentiment d'éclate générale, teintée de chaleur bluesy et de puissance Rock N' Roll, ce qui sera un peu le leitmotiv de ce Rock Or Bust. La première est passée, le moteur commence à s'emballer. Rock The Blues Away, superbe réponse au très décrié Anything Goes du précédent opus, quand d'autres y voient une pâle copie. Premier titre à vraiment faire bouger la tête, Rock The Blues Away brille par sa capacité à nous embarquer comme "Play Ball" dans un trip assez joyeux, et enfin, les choeurs commencent à se faire plus présent et finissent de m'impliquer totalement dans l'écoute de cet album. Sérieux, depuis quand AC/DC n'avait pas réussi à aussi bien manier les voix de la section rythmique ? Dès qu'ils ouvrent leur clapet, il y a une sensation hyper agréable de cohésion et de bonheur qui émane du tout, et qui, par la force des choses, déteint sur l'auditeur. J'aime vraiment croire que le groupe a proposé ce titre histoire de répondre aux déçus du Anything Goes de Black Ice, tout y est plus chaud, plus sincère, et surtout plus intéressant. Beaucoup de saveurs 70's se sont aussi glissées dans ce titre et finissent de me gâter avec générosité, j'aime vraiment beaucoup.
L'aventure semble vraiment débuter avec l'ovni Miss Adventure, et son riff qui aurait tendance à me ramener au AC/DC post-For Those, pré-Ballbreaker, tout en y ajoutant quelques saveurs piochées par-ci par-là dans l'identité du classic rock 70's et 80's. Puis, ces choeurs, bon dieu de bon dieu, quelle puissance ! Mention spéciale à la fin du morceau, qui voit la rythmique assurer le job avec brio, tandis qu'Angus brode sur sa guitare comme un sacré forcené, encouragé par ces terribles choeurs et ce fichtre Brian qui éblouit par sa prestation. Suit Dogs Of War, considéré par certains comme la suite "logique" (pour eux sûrement) au War Machine de Black Ice (il en aura traumatisé des gus celui-là). En dehors d'un "War" prononcé en mode outre-tombe, je ne vois pas vraiment de rapport avec le rejeton de Black Ice. Le tout est très lourd, mais à la fois très chaud, ce qui est vraiment agréable. La voix et les instrus se répondent admirablement bien et nous transportent dans cette facette un peu plus "sombre" à laquelle AC/DC ne s'est laissé aller que bien trop peu souvent. Les envolées guitares d'Angus finissent de parfumer ce titre au tempo lourd, mais définitivement attachant. Puis ces choeurs, bon dieu de bon dieu (je l'ai déjà dit, je sais). Got Some Rock N' Roll Thunder fait sacrément taper du pied et nous renvoie encore une fois au AC/DC que tout le monde est capable d'aimer, le refrain est hyper impliquant, le riff est d'une simplicité folle mais d'une efficacité monstre. Un espèce de boogie blues bien incendiaire et qui n'a pas la prétention d'être plus. Les paroles chantées par Brian et les choeurs sur le refrain sont juste excellents et me foutent des frissons à chaque fois, c'est juste hyper cool et je ne pensais vraiment pas que le groupe nous proposerait des titres aussi feelgood que ça un jour. Hard Times débute avec son étrange intro, puis se pose avec la rythmique impériale d'un Stevie qui assure sa putain de race, pendant que le Cliff fait ronronner son instrument avec talent. Encore une fois, Angus vient parfumer ce titre avec différents plans de guitares tous aussi délicieux les uns que les autres, et Brian lui ? Il braille avec talent, ce mec se bonifie avec le temps, c'est juste incroyable. La bagnole est bel et bien en marche, et elle n'avait pas aussi bien tenu le coup depuis très longtemps.
"Baptism By Fire", LE brûlot de l'album, LE riff incendiaire, LE Brian qui ne fait qu'un avec la musique, LE retour vers un AC/DC en feu qui fait s'asseoir l'assemblée et qui lui explique gentiment ce qu'est un riff. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise de plus ? Prenez "Give It Up" de Stiff Upper Lip, mettez-lui un peu plus de personnalité et de prise de risque sur le riff et une rage digne de Back In Black, et vous obtenez cette magnifique pièce d'énergie, de putain de Rock N' Roll. "Rock The House" et son visage définitivement classic-rock 70's ramène sa fraise, avec son intro coupée entre voix et instruments qui pète juste la classe. On retrouve la grande époque putain, c'est ça que je veux entendre, du AC/DC qui ose enfin assumer d'où il vient, qui ose nous proposer de tels morceaux bâtards, le cul entre ce blues qu'ils aiment tant mêlé à cette énergie digne d'une baston entre hooligans polonais. Le riff est presque "stoner", la puissance putain, LA PUISSANCE. Sweet Candy nous ramène vers un AC/DC plus conventionnel qui nous fait ce qu'il sait faire de mieux, du AC/DC. Le riff est cool, ça casse pas trois pattes à un canard, mais c'est probablement la pièce la plus "à l'aise" de cette grande exposition qu'est Rock Or Bust, un bon soli, une batterie bien lourde et groovy. Je n'en demande pas plus, surtout avec la baffe "Emission Control" qui va venir clôturer le spectacle. Vous voulez que je vous dise, elle me fait rire cette chanson, Emission Control, le groupe y fait tourner un riff un peu comme sur le morceau Black Ice, mais habille bien plus habilement tout ça et offre au titre une espèce de puissance qui nous amène vers un je-ne-sais-quoi de juste jouissif. Quand les choeurs débarquent, j'ai l'impression que c'est une putain de chorale gospel qui ramène sa fraise et qui a décidé de participer à la fête. Le solo est relativement convenu pour un dernier titre, mais quel riff, quelle implication de la part des choeurs, et surtout, quelle impact offert par la batterie de Phil Rudd, une véritable apesanteur, juste bluffant. Dommage seulement que ça se termine en fade-out, j'ai toujours rêvé qu'AC/DC clôture un de ces albums comme ils peuvent conclure leurs shows, en grattant, tapant et criant super fort pendant une ou deux minutes. J'AIME PAS LES FADE-OUT en fin d'album !
Après une trentaine d'écoutes, je crois que jamais je n'aurais espéré entendre un AC/DC aussi audacieux qui semble faire de Rock Or Bust sa machine à expérimenter, à revenir dans le temps etc... Des plans instrumentaux très 70's pour la plupart, aidés par un espèce de feeling classic-rock 80's (les choeurs par exemple, joussifs à souhaits), pendant que Brian fait son truc de manière énorme, quel chanteur, qu'il vieillit bien casquette-man. Rock Or Bust est un album qui nous présente un AC/DC audacieux qui nous propose des choses surprenantes (Miss Adventure, l'intro et la construction de Hard Times, certains plans de Rock The Blues Away et encore, j'en passe, la gueule générale de Dogs Of War, le détonnant et surprenant riff de Baptism By Fire, le rôle des choeurs dans Emission Control, je pourrais continuer des heures encore...). Puis sérieux, j'ai lu pas mal de critiques contre la production, mais c'est mille fois moins lisse que Black Ice, c'est bien plus compact, bien plus chaud, et surtout, TOUT est à sa place. La guitare rythmique un peu plus en retrait ne fait que sublimer les envolées d'un Angus définitivement bien plus inspiré que sur Black Ice, plus généreux aussi (même si encore pas assez ?), et, offre au reste de la rythmique cette petite pichnette de puissance bien suffisante pour déclencher l'ouragan AC/DC. C'est chaud, ça sent bon, ça passe tout seul, et oui, je le dis, Brendan O'Brien a fait un super job ! La basse de Cliff est enragée sur cet opus, et le producteur et son équipe ont totalement réussi à le sublimer, ce qui n'avait pas forcément été le cas par le passé (sauf sur Black Ice, quelques soient ses défauts !). Le Phil tape comme le bûcheron qu'il est et installe tout le monde à sa place comme il a toujours su le faire. Un Tour de Force (et pas de France monsieur Lageat) assez spectaculaire compte-tenu du visage très agité de cet album, qui part un peu dans tous les sens sans vraiment se perdre, il fallait un Phil Rudd pour canaliser (mais pas trop) tout cela, avec ses dents ou non. Boogie, rock, blues, limite funk par moment, aux senteurs presque "stoner" sur d'autres, AC/DC a faim, AC/DC est généreux et il se donne à fond pour essayer de satisfaire, mais surtout, de se satisfaire. Ce n'est pas convenu, ce n'est pas du AC/DC pur jus, c'est un groupe qui a enfin décidé de lâcher un peu + la bride après Ballbreaker et sa Furur ou encore Stiff Upper Lip et son House Of Jazz ou même Black Ice et son Stormy May Day.
Avec cet opus, AC/DC réussit là où il a échoué avec Flick Of The Switch, Fly On The Wall et Blow Up Your Video, le groupe à cette époque a essayé (qu'ils l'assument ou non) de se mêler au son, style, etc... des 80's. Mais le résultat fut décevant, car il manquait cette patte rock énergique et ce côté blues chaud qui a toujours fait le charme des boys. Rock Or Bust et certains riffs nous ramènent aux albums précédemment cités, mais arrivent à sublimer le tout grâce à tous les aspects de sa personnalité (que le groupe a essayé de ne plus assumer à une époque, qu'ils le veulent ou non) qui ont fait son succès dans les années 70. Rajoutez à tout ça un groupe qui veut s'amuser, qui se la joue un peu funky par moment, qui en a un peu rien à foutre finalement et qui fait ce qui lui plaît avec le sourire et la puissance, et vous obtenez Rock Or Bust. Cet ovni AC/DCien en puissance, qui certes nous balade en terrain connu, mais en prenant certains raccourcis qui étaient bien cachés jusque là. Un album décomplexé d'un groupe qui ne s'est jamais autant assumé, quitte à dérouter. Je verrais avec le temps maintenant, mais pour le moment, cet opus est dans mon top 5 AC/DC avec Back In Black, Powerage, Fly On The Wall et Ballbreaker/Stiff (à égalité
).
Enfin, je finirais avec un questionnement qui me taraude depuis deux jours : "Est-ce que cet aspect qui me ramène aux albums des eighties du groupe est présent car Angus a supervisé l'enregistrement ? Est-ce qu'Angus n'était déjà pas + impliqué sur Flick Of The Switch, Fly On The Wall et Blow Up Your Video, des albums composés dans une période où l'alcoolisme de Malcolm était très présent ?" Libre à vous d'y répondre.
Rock Or Bust est un de mes chouchous niveau AC/DC et je crois que c'est bien parti pour le rester !