En 1976, pour la première fois, vous enregistrez un album «
Highway To Hell » en loccurrence - que George ne produit pas puisquil
se voit remplacé par Robert John « Mutt » Lang. Difficile
de retrouver ses repères ?
Ce fut en tout cas différent. Forcément. Mais javoue avoir
plutôt apprécié. Mutt était très enthousiaste.
Il était fasciné de voir à quel point Angus et Malcolm
croyaient en leur musique. Et cette fois était contagieuse. Je ne crois
que sous ses aspects de grand manitou de la prod, il savourait notre intégrité.
Pour moi ce fut une bonne expérience que de travailler avec lui. Bien
sûr, par moment, nous étions un peu perdus sans George et Harry
(Vanda) qui avaient tout de même produits nos 6 premiers albums. Ils avaient
toujours été là pour AC/DC et ce, dès les débuts,
avant même que jarrive. Cest pour cette raison que jai
adoré enregistré Stiff Upper Lip : George était de retour
aux manettes.
Bon Scott est mort le 19 Février 1980. Dans une interview anglaise
datant de 1991 Angus affirmait que, de tous les membres du groupe, tu étais
celui que cette perte avait le plus touché, le plus affecté. Partages-tu
ce point de vue ?
Sa mort ma transie. Personne ne pensait quune telle chose pouvait
nous arriver. Bon avait toujours était un personnage haut en couleurs,
pour le moins, et puis il avait déjà failli mourir à une
ou deux reprises (Ndlr : Phill pense surtout à son accident de moto survenu
en Février 1974) et sen était sorti. Jétais
persuadé quon allait le voir surgir de nulle part, poussait la
porte et rentrer dans la pièce comme si de rien nétait.
Mais cette fois-ci cétait pour de bon. Il ma fallu un certain
temps pour me faire à lidée quil était parti
à jamais, quil était mort et bien mort. (Silence). Nous
étions tous proches de Bon, il était aimé de tout le monde.
Et tous ceux qui le connaissait ont été dévasté
par la nouvelle. Et par la suite, nous avons décidé de poursuivre
sans lui. Nous pouvions lentendre nous dire « Allez-y continuez
! ! ». Il naurait pas souhaité que son départ provoque
la fin dAC/DC.
Que sest-il passé entre 1980 et 1983 qui ait pu provoqué
ton départ du groupe ?
Pfff
. Nous étions devenus immensément populaires grâce
au succès remporté par des albums comme « Highway To Hell
» et « Back in Black ». Et plus ça allait plus les
choses devenaient énormes. Pour promouvoir ces albums et « For
Those About To Rock » nous avons tourné comme des malades et ce
gigantisme ma littéralement consummé, vidé de toute
substance. Mon intérêt sest étiolé. Et lenvie
mest alors venue petit à petit de faire autre chose de ma vie :
pouvoir vivre mes autres passions, le pilotage, le tir, la course auto, des
passions quil métait impossible dassouvir lorsque nous
étions en tournée. Quand tu tournes, tu ne peux rien faire dautre,
tu vis dans un univers à part, 24 H sur 24. Au début, tu apprécies
pleinement car tu découvres un monde parallèle mais au bout dun
certain temps, cela finit par avoir raison de ta santé, tant malade que
physique. A la fin je ne prenais plus vraiment plaisir à monter sur scène.
Mieux valait donc que je me retire et que je me consacre à autre chose.
Joues-tu sur lalbum « Flick Of The Switch » (1983) ?
Oui.
Sur la totalité de lalbum ?
Oui je pense.
Comment le
groupe a-t-il réagi en apprenant ton départ ?
« La vie continue ». Il ny avait pas grand chose dautre
à faire sinon à se pencher sur le nom de ton remplaçant.
Tout de même, tu étais un membre de la famille !
Oui, mais il arrive que des frangins sengueulent, quils ne se voient
pas pendant une éternité. Cela nempêche pas quils
se tombent dans les bras à la revoyure.
Quitter AC/DC a été un soulagement ?
Oui on peut dire ça, je me suis effectivement senti soulagé. Jai
apprécié davoir enfin du temps devant moi pour faire ce
que javais envie sans avoir à respecter des horaires pré-établis.
Jai fait des tas de choses, jai participé à des courses
automobiles pendant trois ans, jai pris des cours de tir au pistolet,
passé mon brevet de pilote dhélicoptère, construit
mon propre studio denregistrement 24 pistes, etc
De 1983 à 1994, as-tu continué à jouer de la batterie
?
Je nai absolument rien fait pendant les six premières années.
Et puis, petit à petit, je my suis remis. Jai réalisé
que je pouvais réaliser mes rêves les plus fous sans pour autant
mettre ma carrière musicale au clou. Javais le sentiment davoir
fait du bon travail avec AC/DC et je navais aucune envie doublier
totalement cette période de ma vie. Jai donc recommencé
à jouer avec deux musiciens néo-zélandais, du rock évidemment.
Nous avons même enregistré quelques trucs dans mon propre studio
que jai fait construire afin, de rester tant soit peu impliqué
dans le milieu musical. Jai également aidé quelques jeunes
groupes en leur donnant des conseils et en leur permettant denregistrer
des démos, voire des albums chez moi. On ne peut pas dire que jai
bossé en tant que producteur, plutôt comme ingénieur du
son.
Tarrives-t-il parfois de penser à AC/DC et déprouver
un manque ?
Quand bien même je ne jouais plus avec lui je me sentais toujours
lié au groupe. Jai toujours été intimement persuadé
dêtre LE batteur dAC/DC, le seul, lunique. Toujours
eu ce sentiment profond que ceux qui me remplaçaient nétaient
là que temporairement. Jai vu le groupe Live sur le Razors Edge
Tour lorsquil est passé par Auckland (Ndlr : le 16 Novembre 1991,
dernière date de la tournée mondiale) et à lissue
du concert les boys et moi avons passé un long moment ensemble à
discuter du bon vieux temps. Lorsque nous sommes sortis des loges, il devait
être 3 heures du matin. Ce fut un très bon moment. A cette occasion,
jai rencontré Chris Slade qui est un excellent batteur. Je dois
dailleurs avoué que jaimais son style bien avant quil
ne joue dans AC/DC. Je lai trouvé bon sur scène avec le
groupe. Rien à redire. Chris était là et bien là
et il ny avait aucune raison que la situation évolue rapidement.
Aussi ne me suis-je pas dit que javais une chance de revenir dans le groupe.
Ce qui ne ma pas empêché, après quelques bières,
de dire à Malcolm, « Si vous avez besoin de moi je suis de nouveau
disponible ». Je crois quAngus et lui avaient posé une oreille
sur des bandes que javais enregistrées dans mon studio en Nouvelle-Zélande
et, avaient réalisé que jétais toujours capable de
mettre une caisse claire en pièce. Plus tard, Malcolm ma donc appelé
et ma demandé de venir jammer sur quelques idées. Je les
ai rejoins et, boum, dans la seconde, nous avons compris que nous étions
faits lun pour lautre, rien navait changé. Cétait
comme si jétais simplement sorti chercher un paquet de clopes.
Pourtant nous navions pas joué ensemble depuis douze ans, autant
dire une éternité !
Paradoxalement, il y a dix-neuf ans, en 1982, AC/DC donnait des concerts
plus courts que ceux daujourdhui. Dans lintervalle, le groupe
a vieilli. Nest-ce-pas dur de tenir cette cadence infernale à laquelle
tu nétais plus habitué ?
Et encore, les shows du Ballbreaker Tour 96 qui marquaient mon retour duraient
encore plus longtemps que ceux de cette tournée Stiff Upper Lip puisquils
dépassaient parfois deux heures et quart. Aujourdhui nos concerts
durent deux heures, et gagnent, je crois, en force dimpact. Car nous ne
faisons pas de pause accoustique au milieu du set : nous commençons par
un « Bang » et finissons par un « Bang », aucun temps
mort. Deux heures, cest le juste milieu. Au-delà, pour les musiciens
comme pour le public, il est difficile de maintenir son attention, sa concentration.
Lorsque je suis revenu en 1996, jai eu quelques problèmes de tendons
douloureux qui mont causé du souci mais cela sest réglé
avec le temps. Je nen suis plus victime aujourdhui, mon corps est
en parfaite santé.
En Août 1995, tu as fait ton grand retour sur le tournage du clip
« Hard As A Rock ». A cette occasion, les fans, trop contents de
te voir revenir, ont chanté ton prénom à tue-tête.
Emu ?
Oui, bien sûr, cet accueil ma énormément touché.
Grand nombre de fans mont dit des choses vraiment sympas, quils
considéraient que jétais LE batteur du groupe. Cest
toujours agréable dentendre ça. Jen étais très
heureux. Dautant, que, pour moi, notre petit dernier « Stiff Upper
Lip », tient la dragée haute à mes albums préférés
dAC/DC, « Powerage » & CO. Cest un bon disque, vraiment